« Le logement social et ses partenaires en 1ère ligne de la crise sanitaire »
Synthèse du webinaire organisé par News Tank Cities le 17/04/2020

> Actualité n° 181071 publiée le 20 avril 2020 par News Tank Cities (accès réservé aux abonnés), avec l’aimable autorisation de reproduction de News Tank Cities (© photo : BB)
• Assurer la continuité du service, répondre aux besoins des locataires et poursuivre les attributions ;
• assumer un rôle d’amortisseur pour les fournisseurs et prestataires ;
• préparer la reprise et réussir la relance ;
• revendiquer des procédures administratives simplifiées et une prise de décision rapide à l’échelle territoriale.
Telle est le conclusion du webinaire « Le logement social et ses partenaires en 1ère ligne » de la crise sanitaire, organisé par News Tank Cities le 17/04/2020, avec les contributions de Jean-Luc Vidon, président de l’Aorif, Nadia Bouyer, directrice générale de Seqens, Jean-Alain Steinfeld, directeur interrégional Île-de-France de CDC Habitat, Damien Vanoverschelde, directeur général de Hauts-de-Seine Habitat, Frédéric Lavergne, directeur général d’Erilia, Aurélie Gaudillère, directrice associée d’Enerlis, Benjamin Frémaux, directeur général d’Idex, et Benjamin Brullon, directeur général de Manergy.
Pour réussir la relance, il y a la « nécessité de résorber les inégalités en Île-de-France, notamment en Seine-Saint-Denis. Il faudra reconnaître le logement social comme un bien de première nécessité. Les personnes qui font fonctionner le pays aujourd’hui ont besoin d’avoir un habitat abordable », indique Jean-Luc Vidon. L’USH propose de doubler la production de PLAI pour passer de 30 000 à 60 000 logements par an et de ramener la TVA à 5,5 % sur toutes les opérations.
La poursuite de la transition écologique dans le patrimoine des bailleurs est aussi un pré-requis de la sortie de crise. « Erilia souhaite une relance au travers de l’économie verte et nous pouvons être en capacité d’aller plus loin sur ce point », selon Frédéric Lavergne.
Vis-à-vis des prestataires, les bailleurs peuvent faire preuve de souplesse. « Dans certains cas, nous pouvons proposer des avances sur des prestations dont on sait qu’elles seront faites », dit Jean-Luc Vidon. Selon Frédéric Lavergne, « pour continuer à assurer ce rôle contracyclique, les bailleurs peuvent répondre présents sur des sujets de reprises de l’économie dans le secteur du bâtiment », notamment auprès des entreprises de maintenance.
Sur la simplification de procédures administratives et la prise de décision à l’échelle locale, la période de crise permet « de voir ce qui fonctionne et les choses sur lesquelles nous pourrions obtenir des simplifications, comme les autorisations d’urbanisme », dit Nadia Bouyer. « Nous sommes en capacité de jouer ce rôle d’amortisseur si on nous donne les moyens administratifs de le faire », déclare Frédéric Lavergne.
Assurer la continuité du service et répondre aux besoins des locataires
Afin d’assurer la continuité de service pour les locataires, Jean-Luc Vidon, président de l’Aorif, relève que les bailleurs sociaux s’engagent pendant la crise sanitaire « pour assurer le service quotidien, l’information aux habitants, le lien avec les amicales de locataires ». « L’attention se porte aussi sur les loyers et les charges avec des dispositions prises par les bailleurs pour accompagner les locataires ».
Jean-Alain Steinfeld, directeur interrégional Île-de-France de CDC Habitat, relève que « le soin pour les locataires » et notamment « le maintien de la propreté et d’un cadre de vie corrects » sont essentiels en cette période de crise sanitaire. « La propreté urbaine est un pré-requis de la sûreté urbaine ».
Hauts-de-Seine Habitat avait « anticipé » le confinement et « recentré les actions prioritaires sur l’hygiène et réorganisé la totalité des services », indique Damien Vanoverschelde, directeur général de l’OPH départemental.
Dans le cadre des 12 résidences seniors gérées par l’office, des difficultés d’approvisionnement en masques ont du être résolues. « Nous pouvons tenir jusqu’au 30 avril mais si nous n’avons pas de livraisons d’ici là, on sera obligé de suspendre des activités », ajoute-il.
« Nous avons tous réussi à gérer les priorités pour maintenir le bon fonctionnement des immeubles », indique Nadia Bouyer, directrice générale de Seqens. L’ESH du groupe Action Logement a mis en place « des principes qui vont nous guider dans l’accompagnement personnalisé des locataires sur les conséquences économiques de la crise », dans le cadre d’une charte d’accompagnement.
« Des personnes vont aussi se retrouver sans revenu et plutôt que d’attendre, nous souhaitons jouer notre rôle d’amortisseur, contracylique, en proposant aux locataires de verser une partie de leur loyer dans les mois à venir, selon un taux d’effort compatible avec leurs ressources ».
Maintenir des attributions de logements
« Les attributions de logements sont en berne », constate le président de l’Aorif. « Mais le processus continue et les Caleol ont repris pour certains bailleurs, car la mobilité est essentielle », ajoute-il.
L’ESH Seqens a maintenu certaines attributions et chaque semaine les commissions d’attribution ont lieu. Dans les 15 premiers jours d’avril, 50 entrées dans un logement ont eu lieu, permises par la mise en place d’un bail numérique, dès le 15 mars.
Jouer un rôle d’amortisseur pour les fournisseurs et prestataires
Si les chantiers sont à l’arrêt, il faut « souligner le travail des prestataires de maintenance, des entreprises d’exploitation et des PME », indique Jean-Luc Vidon. Chez Enerlis, « les 3 quarts de nos effectifs sont en chômage partiel », indique Aurélie Gaudillère.
« Sur 18 % de clients actifs, qui continuent les travaux, 10 % sont des bailleurs sociaux », ajoute-elle. « Les marchés continuent, certains ont gelé les pénalités, ce qui est important car évidemment il y aura des retards ». Après la publication du guide de l’OPPBTP, « notre travail consiste à mettre en place la surveillance et la protection adaptées à cette situation ».
Idex fait partie « des rares prestataires à encore entrer dans les logements » pendant la crise sanitaire. « Malgré les mesures de chômage partiel, de prêts garantis par l’État, il y aura quand même un sujet de trésorerie », indique Benjamin Fremaux.
Préparer la reprise
Aurélie Gaudillère estime qu’il faut « distinguer la reprise opérationnelle à court terme et la relance dans le monde de l’après Covid-19 ». Une nouvelle organisation « entre les bailleurs sociaux et fournisseurs, avec l’appui des pouvoirs publics nationaux locaux » est à prévoir.
« Nous allons avoir besoin des bailleurs sociaux, d’une visibilité dans la suite de leurs projets en matière de baisse de consommation d’énergie et de décarbonation du patrimoine ».
« La capacité de relance est liée à la réussite de la reprise, qui doit être progressive et permettre un dialogue important entre les bailleurs sociaux et partenaires, les entreprises du bâtiment et la maîtrise d’œuvre », déclare le président de l’Aorif.
Réussir la relance
Résorber les inégalités
« Dans une région comme l’Île-de-France, une politique plus volontariste pour résorber les inégalités est impérative », indique Jean-Luc Vidon.
« Avec une attention particulière en Seine-Saint-Denis qui fait face à une surmortalité, avec des habitants en première ligne, ce sont eux les soignants, qui désinfectent bureaux, font fonctionner les transports et la grande distribution. Le département ne bénéficie pas de la solidarité nationale. La rénovation urbaine, les opération de requalification de copropriétés, doivent intégrer des services, un cadre de vie ».
« Il faudra reconnaître le logement social comme un bien de première nécessité. Les personnes qui font fonctionner le pays aujourd’hui on besoin d’avoir un habitat abordable », ajoute-il. Un redémarrage qui doit être centré sur la production de logements en PLAI et en PLUS et un encadrement des opérations en VEFA.
L’USH propose, dans le cadre d’un plan de relance, de doubler la production de PLAI, passant de 30 000 à 60 000 par an.
Poursuivre la transition écologique
« Il faut poursuivre la rénovation thermique du patrimoine », ajoute le président de l’Aorif. « Les bailleurs pourraient être les fers de lance de la relance verte », estime Aurélie Gaudillère.
« Nous devons préparer la transition énergétique et la résilience du patrimoine », ajoute Benjamin Brullon, directeur général de Manergy. « Préparer les patrimoines permet de préparer les crises », estime-t-il.
« Erilia souhaite une relance au travers de l’économie verte et nous pouvons être en capacité d’aller plus loin sur ce point », indique Frédéric Lavergne, directeur général d’Erilia.
Souplesse des bailleurs avec les prestataires
Vis à vis des prestataires, les bailleurs sociaux peuvent faire preuve « de souplesse » car il n’y a pas d’intérêt « à ce que les entreprises déposent le bilan en sortie de crise », indique Jean-Luc Vidon. « Dans certains cas, nous pouvons proposer des avances sur des prestations dont on sait qu’elles seront faites », ajoute-il.
« Pour continuer à assurer ce rôle contracyclique, les bailleurs peuvent répondre présents sur des sujets de reprises de l’économie dans le secteur du bâtiment », notamment auprès des entreprises de maintenance, indique Frédéric Lavergne,
« Notre modèle économique sera moins perturbé que l’activité commerciale, qui est courtermiste », ajoute-il. Le rôle des bailleurs sociaux dans la reprise peut être de « proposer des plans de relance auprès des promoteurs ».
Simplifier les procédures et la prise de décision à l’échelle territoriale
Pour la reprise des chantiers « nous avons besoin de mesures de simplification ». « Nous souhaitons plaider notre cause auprès des pouvoirs publics sur la simplification des procédures de marchés », ajoute Frédéric Lavergne. Cette période de crise permet aussi « de voir ce qui fonctionne et les choses sur lesquelles on pourrait avoir des simplifications, comme les autorisations d’urbanisme », estime Nadia Bouyer. « Pour les décideurs publics, facilitez nous la reprise rapide avec des prises de décisions rapides », ajoute-elle.
Sur les agréments de logement, « on pourrait aller plus vite, ne pas être bloqués dans les instructions ». La relance « se fera aussi avec l’État et les collectivités qui déterminent les ambitions dans les territoires », estime Jean-Luc Vidon. « Si nous voulons jouer le rôle de courroie entraînante, il est urgents que des simplifications aient lieu », selon Frédéric Lavergne, notamment en matière de commande publique. « Très vite, nous avons la possibilité de décliner l’impulsion nationale au niveau local par une convention avec les préfectures pour décliner des mesures de simplification ».
« Nous sommes en capacité de jouer ce rôle d’amortisseur si on nous donne les moyens administratifs de le faire ».
« Il faut simplifier, pour que les opérations puissent aller vite », estime Jean-Luc Vidon. Une convention signée en septembre 2019 entre l’Aorif, la préfecture de région et la Banque des territoires prévoit l’accélération des mises en service de logements, rappelle-t-il. Selon lui, « nous avons besoin d’une métropole qui fonctionne bien et au-delà de ce qu’elle fait aujourd’hui pour réinjecter de l’égalité, sur le territoire de la Métropole du Grand Paris ».
Conseils municipaux et intercommunalités : nécessaire « stabilisation » des partenaires dans les territoires
Il est « urgent que les conseils municipaux et intercommunalités s’installent car il manque un opérateur essentiel qui est capable de prendre des décisions à court et moyen terme », estime Damien Vanoverschelde.
Après la crise, « nous aurons un sujet sur l’installation de la réservation en flux avec les collectivités locales et nous y arriverons si nos partenaires sont stabilisés, estime Jean-Alain Steinfeld. »Une coordination plus forte à l’échelle régionale » serait profitable au secteur.