Mobilisés pour le développement du logement social en Ile-de-France
PRODUCTION
Article paru dans la revue Ensemble n°56 – avril 2020
Alors qu’un des effets de la crise Covid-19 a été l’arrêt net des chantiers franciliens, nous revenons dans cet article sur le bilan de la production 2019 et sur les attentes prioritaires de la profession.
Les effets de ces arrêts sont difficilement mesurables mais on comptera certains retards de livraison ainsi qu’une fragilisation du système productif, voire une hausse des coûts de construction. Concernant la programmation – les agréments – de logement sociaux, la crise vient rappeler la nécessité de dématérialiser les procédures d’agréments, via le système d’information Suivi et Programmation des Logements Sociaux (SPLS). La dématérialisation complète de SPLS est un des axes de l’accord signé en septembre 2019 entre l’AORIF, la DRIHL et la Banque des territoires IdF qui vise à accélérer la production de logements sociaux.
Ajoutons aussi les incertitudes qui concernent la tenue des élections municipales : la programmation du développement du parc locatif social francilien n’est pas un exercice aisé en cette année 2020 !
Une production 2019 de logements sociaux stabilisée mais qui reste insuffisante
D’après le bilan présenté le 28 février dernier en CRHH, 28 594 logements sociaux ont été agréés en 2019 en Ile-de-France (hors ANRU), avec une répartition homogène entre les produits : 9 231 PLAI, 9 999 PLUS et 9 364 PLS.
Le niveau 2019 de la production de logements sociaux en Ile-de-France est sensiblement équivalent à celui de 2018. Après une baisse des agréments de près de 20% entre 2016 et 2018, la production s’est donc stabilisée en 2019, malgré un contexte toujours défavorable pour le secteur. Mais ce nombre ne représente que 77% de l’objectif de 37 000 agréments annuels inscrit dans le SRHH (Schéma régional de l’habitat et de l’hébergement), fixé au regard des besoins des Franciliens.
Même si les organismes Hlm restent fortement mobilisés pour produire, on ne peut se satisfaire de cette situation. L’atteinte de l’objectif de production fixé par le SRHH suppose la réunion d’un certain nombre de facteurs favorables qui font défaut aujourd’hui aux acteurs du logement social, dans une région où le marché du logement est de plus en plus tendu.
Une capacité d’investissement des organismes affaiblie
Même si la conclusion de la « clause de revoyure » signée en avril dernier entre l’Etat et la profession a pu stabiliser le cadre économique du secteur pour 2020-2022, il convient de rappeler que la capacité d’investissement des organismes Hlm a été fortement impactée par la RLS (Réduction de loyer de solidarité) destinée à faire compenser par les organismes la forte baisse des APL imposée par l’Etat aux locataires du parc social.
Il convient également de souligner que les aides à la pierre du FNAP (Fonds national des aides à la pierre) distribuées par l’Etat ne sont plus financées par le budget national, mais par les organismes HLM et Action Logement, et que les montants moyens de subventions du FNAP sont en baisse régulière ces dernières années alors que les prix du foncier et de la construction connaissent une inflation hors norme en Ile-de-France. Les bailleurs sociaux devraient au contraire bénéficier, dans ce contexte très difficile pour les ménages en recherche d’un logement abordable, d’un soutien public renforcé au titre de la solidarité nationale.
Un décrochage par rapport à la dynamique du logement privé
Alors que la production Hlm stagne après une baisse les deux années précédentes, le logement privé connaît quant à lui un niveau très élevé de construction. Le décrochage de la dynamique du logement social par rapport à celle du logement privé est inquiétant.
Il y a pour les bailleurs sociaux nécessité à bénéficier d’un accès direct au foncier de façon beaucoup plus large, afin de ne pas devenir dépendants de la production du secteur privé par le biais de la VEFA (Vente en l’Etat Futur d’Achèvement). Pour accroître la production, il convient que les collectivités et les aménageurs, notamment ceux relevant de la puissance publique, se mobilisent davantage pour contribuer aux objectifs franciliens de production de logements sociaux et soutenir la maîtrise d’ouvrage Hlm.
Le rôle clé des élus locaux
Dans le cadre du nouveau mandat qui va s’ouvrir après les élections municipales, les élus locaux ont également un rôle clé à jouer pour contribuer au déploiement d’une dynamique équilibrée du logement entre social et privé. Convaincre les élus locaux est donc essentiel. C’est ce que l’AORIF s’attache à faire, notamment à travers la campagne « Logement social en Ile-de-France, IDÉES NEUVES ! ».
Rencontre Préfet de Région – AORIF – Banque des Territoires du 9 mars 2020
Synthèse de l’intervention du 09/04/2020 de Jean-Luc Vidon, Président de l’AORIF
Alors qu’en séance plénière du CRHH le 22 février dernier, l’AORIF avait fait état de la grande préoccupation des organismes franciliens devant l’accroissement de la difficulté à se loger en Ile-de-France, lors de la rencontre du 9 mars Jean-Luc Vidon a souhaité insister sur quelques-unes des attentes prioritaires de la profession.
Un accord pour accélérer le développement du logement social en Ile-de-France
Fin septembre 2019, au cours du Congrès Hlm de Paris, l’AORIF a signé avec la Préfecture Ile-de-France et la Banque des Territoires un accord pour « Accélérer le développement et la mise en service des logements sociaux en Ile-de-France». Dès 2018, les organismes franciliens avaient exprimé une forte attente de fluidification et de simplification des procédures administratives et financières. L’accord signé prend en compte cette demande, dans une logique de travail partenarial.
Il nous appartient aujourd’hui de mobiliser tous les opérateurs, services instructeurs et partenaires, afin de réussir le déploiement de cet accord. Pour ce faire, de premiers travaux ont été engagés : recensement de logements qui n’ont pu être agréés en fin d’année 2019 et qui pourraient faire l’objet d’un dépôt rapide de demande, réflexion sur l’harmonisation et la simplification des conventions APL, repérage de logements temporairement vacants disponibles pour des opérations de logement ou d’hébergement transitoire…. Au-delà de ces travaux en cours, les attentes prioritaires de la profession sont les suivantes.
Accès direct au foncier
La VEFA a pris aujourd’hui beaucoup trop d’importance. Elle ne permet pas aux bailleurs sociaux de participer avec les collectivités à la conception des quartiers ; elle les met en concurrence sur les prix ; elle conduit parfois à produire des logements qui ne correspondent pas à leurs attentes (surfaces, typologies, qualité environnementale) ; elle met en risque la maîtrise d’ouvrage Hlm et réduit à la plus simple expression les relations des organismes avec la maîtrise d’œuvre. Nous tenons à rappeler à l’Etat, aux collectivités, aux Etablissements publics fonciers ou d’aménagement qu’ils portent aussi une responsabilité dans le mode de production de la ville et la place donnée aux différents acteurs. Les organismes Hlm sont leurs partenaires dans la durée ; à ce titre, ils doivent être associés en amont des opérations. Un rééquilibrage de l’affectation des charges foncières dans les projets d’aménagement semble indispensable.
Contreparties foncières pour les organismes
Les contreparties foncières devraient permettre la reconstitution d’une offre nouvelle de logement social ou intermédiaire, notamment dans le cadre des ORCOD et des travaux de la SGP. Ce n’est que rarement le cas, alors même que les organismes Hlm sont mobilisés pour les relogements liés à ces opérations, y compris parfois ceux des locataires du secteur privé.
Reconstitutions ANRU
Les reconstitutions ANRU posent des questions d’échelle géographique et d’articulation avec la programmation de droit commun. Il reste aujourd’hui très difficile de raisonner, au moins pour partie, à l’échelle métropolitaine ou régionale, alors que l’enjeu du rééquilibrage du logement doit aussi se penser à ce niveau.
Cotation de la demande et gestion en flux
Enfin, Jean-Luc Vidon a souhaité aborder le sujet de la mise en œuvre de la cotation de la demande et de la gestion en flux des contingents de réservation. Si ces dispositions ne concernent pas directement la production, elles vont mobiliser et impacter les organismes Hlm et l’ensemble des réservataires qui contribuent au financement du développement de l’offre. La Préfecture d’Ile-de-France a décidé de piloter et d’accompagner ce chantier à l’échelle régionale, avec la DRIHL. Cette décision semble de nature à faciliter la recherche de solutions équilibrées.